Cinéma rencontre filmer le travail Restitution
Depuis quelques années, des musées occidentaux entament des démarches de restitutions d’œuvres et de restes humains auprès de pays du Sud global. Une question de justice pour Françoise Vergès, politologue, historienne, militante féministe et décoloniale : « Les restitutions sont une question de justice. C’est aux peuples et aux communautés qui ont été privés de leurs arts et culture que revient le choix des objets à restituer et des conditions dans lesquelles ils sont rendus. La restitution n’est pas une métaphore, ni un geste de communication, c’est un processus qui requiert temps et débats. »
Une projection-rencontre le jeudi 20 février à la Médiathèque François-Mitterrand, dans le cadre du Festival Filmer le travail.
de Nora Philippe
DOCUMENTAIRE / FRANCE / 82’ / 2021 / ARTE France, Cinétévé
Dans la course nationaliste, les pays européens ont cherché à partir de la fin du 19e siècle à édifier les musées les plus grandioses et les plus riches en collections. Depuis les pillages, les communautés et pays d’origine luttent pour le retour de leurs oeuvres exilées, de leurs objets sacrés, de leurs ancêtres. Mais les grands musées de l’hémisphère nord ont toujours puissamment résisté à cet appel à la justice. En 2018, un rapport commandité par la présidence française aux penseurs Felwine Sarr et Bénédicte Savoy provoque une déflagration. L’heure des restitutions définitives semble avoir sonné. Les pays européens se disent alors prêts à rendre. Les musées africains se multiplient et préparent les retours. Le temps de l’action, pourtant, s’étire. Le spectre colonial continue de hanter cette géopolitique complexe. Les Etats européens tiendront-ils leurs promesses ?
La projection sera suivie d’un échange avec Françoise Vergès, politologue, historienne, militante féministe et décoloniale, autour de son livre Programme de désordre absolu : décoloniser le musée (Ed. La fabrique, 2023).
Le musée occidental est un champ de bataille – idéologique, politique et économique. Si à peu près tout le monde veut aujourd’hui « repenser le musée », peu ont pourtant l’audace d’interroger les présupposés mêmes du musée universel, produit des Lumières et du colonialisme, d’une Europe qui se présente comme la gardienne du patrimoine de l’humanité tout entière.
En arpentant l’histoire du Louvre, en discutant les impasses de la représentation de l’esclavage, en examinant des tentatives inabouties de subvertir l’institution muséale, Françoise Vergès esquisse un horizon radical : décoloniser le musée, c’est mettre en œuvre un « programme de désordre absolu », inventer d’autres manières d’appréhender le monde humain et non humain qui nourrissent la créativité collective et rendent justice et dignité aux populations qui en ont été dépossédées.
“Les restitutions sont une question de justice. C’est aux peuples et aux communautés qui ont été privés de leurs arts et culture que reviennent le choix des objets à restituer et des conditions dans lesquelles ils sont rendus.” Françoise Vergès
En partenariat avec l’Espace Mendès France, dans le cadre des Amphis des Lettres au présent, un cycle coorganisé avec l’UFR Lettres et langues de l’université de Poitiers.